
Emmanuelle MAUBON, directrice du département Personnes Protégées à la Caisse d’Epargne Aquitaine Poitou-Charentes.
Quelles sont aujourd’hui les principales caractéristiques du marché des personnes protégées ?
Selon les derniers chiffres du Ministère de la Justice, il y aurait aujourd’hui, en France, environ 800 000 personnes majeures sous protection juridique.
450 000 de ces mesures sont gérées par des mandataires professionnels et 350 000 par des membres de la famille. 49% des personnes sous protection sont des femmes et leur âge moyen est de 56 ans. Enfin, on notera que depuis quelques années on constate une véritable précarisation de ces personnes protégées. Car si leur revenu annuel moyen est estimé à 15 200 €, 50% d’entre elles vivraient sous le seuil de pauvreté. Je terminerai en précisant qu’en 2040, le nombre de majeurs protégés devrait tout simplement avoir doublé !
Quelles ont été les dernières grandes évolutions législatives propres à ce marché ?
Tout d’abord, il faut savoir que c’est un marché très réglementé et particulièrement contraignant. Ce qui n’est pas étonnant puisque chaque décision qui est prise peut tout de suite avoir des conséquences financières importantes. D’où la nécessité de faire preuve d’une vigilance extrême dans la gestion de chaque dossier. Pendant très longtemps, les divers acteurs du monde judiciaire (et notamment les avocats et magistrats) mais aussi les familles confrontées à la prise en charge d’un parent « vulnérable », ont réclamé une réforme profonde du régime des personnes protégées. Cela a été fait une première fois en 2007 puis une seconde avec la loi du 15 octobre 2015 qui a fait le choix de placer la personne protégée et ses intérêts au cœur du dispositif en lui laissant le maximum d’autonomie quand cela est possible. L’ambition du législateur étant, alors, que les familles puissent prendre plus de poids dans le dispositif. Ce qui n’est pas toujours facile. Les familles sont parfois loin géographiquement de la personne protégée, il y a des contraintes réglementaires fortes, une méconnaissance des dispositifs et des droits, et cela demande du temps ; tout cela peut donc « faire peur ». Cette volonté de simplification a, par exemple, donné naissance à l’habilitation familiale, une nouvelle mesure de protection qui commence juste à se développer.
Quel est aujourd’hui le positionnement de la Caisse d’Épargne Aquitaine Poitou Charentes en matière de protection des personnes vulnérables ?
La Caisse d’Epargne Aquitaine Poitou-Charentes a toujours fait figure de précurseur sur ce marché certes de plus en plus concurrentiel mais qui nécessite de disposer d’une véritable expertise et d’un service client dédié. Ce qui est notre cas. Nous gérons ainsi un peu plus de 29 000 personnes qui sont sous une mesure de protection dont 21 000 de ces mesures sont gérées avec un mandataire judiciaire professionnel (associations tutélaires comme les UDAF, les centres hospitaliers ou mandataires privés). Nos gestionnaires travaillent en étroite collaboration avec plus de 500 de ces professionnels. Côté offre, nous avons mis à disposition des mandataires le service Webprotexion qui leur permet de gérer à distance, sur Internet, les comptes des personnes dont ils sont les représentants légaux. Et pour favoriser l’autonomie bancaire des personnes protégées, nous proposons une carte de paiement sécurisée avec interrogation systématique du solde du compte.
Et quelles sont ses ambitions pour les années à venir ?
Tout d’abord conserver et renforcer notre position de leader sur le marché des mandataires professionnels. En développant encore plus l’expertise de nos gestionnaires, notamment en ce qui concerne la gestion de patrimoine. Sur le marché de la « tutelle familiale », c’est à dire quand la mesure de protection est gérée par un membre de la famille c’est un peu différent. Pour le moment, toute la partie réglementaire est prise en charge par notre Centre de Relation Client basé à Poitiers, le reste étant géré directement en agence. Nous réfléchissons donc actuellement à un modèle d’animation plus opérationnel de la tutelle familiale, afin de pouvoir encore mieux répondre aux attentes des familles et aux besoins des personnes protégées. Mais aussi parce que les enjeux financiers en matière d’épargne sont très importants (la surface financière moyenne d’une mesure familiale est trois fois plus élevée que celle gérée par un professionnel). L’enjeu est de taille puisque, comme je l’ai souligné précédemment, le législateur veut privilégier les solutions familiales en matière de protection juridique des personnes vulnérables.
Bon à savoir
Le Département Personnes Protégées de la Caisse d’Epargne Aquitaine Poitou-Charentes est rattaché à la Direction des Marchés Institutionnels et Immobilier Professionnel . Il compte 9 gestionnaires d’affaires répartis sur l’ensemble de la région et 6 personnes assurent le fonctionnement du service client dédié.